« Retour à la Foire de Paris », pour M. Trương Hưu Lương, ce n’est pas partir à la découverte de nouvelles inventions, de nouveaux produits utiles pour la maison, de déguster vins et spécialités gastronomiques. Loin de tout ceci, c’est pour lui, l’occasion d’évoquer ses souvenirs lointains, à une époque révolue, ayant pour cadre La Foire de Paris, et pour acteurs des personnages célèbres, bien connus, aujourd’hui disparus.
Il y a 60 ans, presque jour pour jour, pour la première fois, j’ai mis les pieds à la Foire de Paris, Porte de Versailles. Je vivais à Paris depuis 5 ans mais mes études ne me donnaient pas le loisir d’aller assister à ce grand événement qui avait lieu tous les ans à l’époque des examens. Ce n’était donc pas en visiteur que je me rendis à la Foire de Paris en ce mois de Mai 1955 mais en tant que Représentant du Viet nam ou plus exactement Responsable du Stand de l’Etat du Viet- nam. C’est ainsi que j’ai fait connaissance avec cette célèbre Foire connue du monde entier et à laquelle un grand nombre de pays participe.
Aujourd’hui, suite à l’insistance de mon adorable moitié, je l’ai accompagnée à la Porte de Versailles pour renouer avec mes premières amours à l’endroit qui m’a laissé de nombreux souvenirs inoubliables.
En effet, pendant trois années consécutives, je devais organiser, en collaboration avec quelques uns de mes collègues de l’Ambassade et avec l’assistance d’abord du célèbre peintre Lê Phổ et ensuite avec le non moins célèbre architecte Võ Toàn Công, la participation de notre pays à cette fameuse rencontre internationale.
Apparemment, La Foire reste toujours la même avec de nombreux pavillons dans lesquels se trouvent plusieurs stands tant nationaux qu’étrangers. Mais un changement important m’a frappé : l’absence des stands officiels organisés par les pouvoirs publics des nations étrangères comme à mon époque où notre pays n’avait qu’un seul stand dans lequel étaient exposés divers produits artisanaux envoyés du Viet nam par le truchement des deux Ministères des Affaires Etrangères et de l’Economie.
Pendant que Vân Khanh fait le tour des stands principalement ceux venant du Viet-nam, je me repose tranquillement dans une petite buvette Vietnamienne pour me rafraichir et essayer de retrouver dans ma mémoire les souvenirs et les images d’antan relatifs à mes activités professionnelles ainsi qu’aux rapports humains qui m’ont lié à des amis et des collègues qui avaient joué un rôle dans l’organisation du Pavillon du Viet-nam des années 50.
Le premier personnage qui revient dans mon esprit n’est autre que M. Phạm duy Khiêm, mon ancien Professeur au Lycée Albert Sarraut à Hà Đông en 1944 et devenu par la suite le premier Ambassadeur de l’Etat du Viet-nam à Paris et ainsi mon supérieur hiérarchique . C’était d’ailleurs lui qui m’avait embauché à l’Ambassade et qui m’avait chargé des Affaires Economiques et Financières.
Je devenais ainsi à ce titre le principal responsable de la participation de notre pays chaque année à la Foire de Paris. Je ne puis m’empêcher de penser avec émotion à ce personnage plein de contradiction qu’était mon ancien Chef pour qui je garde toujours, pour ma part, une admiration et un respect indéfectibles. Pour certains en effet, l’homme de lettres P.D.Khiêm est un demi-fou. Ne s’était-il pas engagé volontairement dans l’Armée française durant la Deuxième guerre mondiale pour aller combattre les Allemands alors qu’il n’avait rien fait pour la reconquête de l’Indépendance du Viet-nam ? N’était-il pas trop intransigeant jusqu’au point où il mettait un -2 ou-3 à un candidat au Baccalauréat alors qu’il ne suffisait que d’un 07/20 à l’épreuve de Français pour que ce candidat soit collé à l’examen ?
Il était sévère non seulement avec ses élèves mais même avec ses proches dont son propre frère, le célèbre compositeur Phạm Duy qu’il considérait comme un échec de la famille alors que plus tard, ce dernier était devenu l’artiste le plus populaire de la chanson rénovée du pays et quasi- unanimement admiré du public pour ses œuvres.
Par contre, Pham duy Khiêm est applaudi par bon nombre de ses partisans qui l’appréciaient pour son intégrité, son honnêteté, son sens de l’honneur et surtout sa franchise. C’était non seulement un grand intellectuel diplômé de l’Ecole Normale Supérieure de la même promotion que G.Pompidou, L .S. Senghor (Lycée Louis le Grand), un écrivain connu et primé grâce à son ouvrage « Légendes des terres sereines » mais c’était aussi un homme politique qui aimait son pays et ses valeurs morales et culturelles, un homme courageux ne cédant à aucune pression même venant des milieux les plus puissants.
En tant que l’un de ses proches collaborateurs, j’avais eu le privilège de connaître son audace face à M. Ngô đình Nhu , l’Eminence Grise de la 1ère République du V.N. Dans une lettre écrite à ce dernier où Khiêm le tutoyait (c’était des amis de jeunesse) il lui reprochait en des termes violents d’avoir cru aux rumeurs qui voulaient discréditer Khiêm et semer la discorde entre Khiêm et le nouveau régime du Président Ngô Đình Diệm.
Vis-à-vis du Gouvernement français auprès duquel il était accrédité il ne se montrait pas aussi francophile qu’on le croyait. Un exemple pour montrer sa franchise et sa dignité devant un acte indélicat d’une haute personnalité française. Il s’agit du Président René Coty qui, justement à l’occasion de l’inauguration de la Foire de Paris de 1955, avait ignoré de visiter le Stand du Viet-nam où l’attendaient M. Khiêm et sa suite dont je faisais partie.
Ce n’était pas une omission mais bien une manifestation intentionnelle du mécontentement du gouvernement de l’époque qui était en pleine brouille avec le nouveau régime du Viet-nam soutenu par les Américains dans la nouvelle phase de lutte contre les communistes du Nord.
Le Haut Représentant du Viet-nam , S.E. M.Pham duy Khiêm , très en colère, avait donc décidé de ne plus revenir l’année suivante à la Foire et n’envoya que son Conseiller Culturel, M. Bùi xuân Bào et moi-même, l’Attaché Economique et en même temps Responsable du Stand du V.N.
Mais contrairement à ce que nous nous attendions, cette fois-ci, le Président français s’était bien arrêté à notre Stand et longuement enquis auprès du Directeur du Stand du sort des réfugiés maintenant installés dans le Sud. Il lui avait même demandé de leur transmettre sa sympathie et sa vive émotion. Il fallait penser que cette attitude du Président Coty était dûe à l’amélioration des relations franco-vietnamiennes entre-temps, le Gouvernement français sachant qu’il ne pouvait rien changer à la situation au Viet-nam, le Président Diệm ayant bien assis son autorité sur l’ensemble du Sud V.N. après avoir éliminé les forces para-militaires pro-françaises qui lui étaient hostiles. Les Français devaient donc accepter la nouvelle donne politique et établirent leurs rapports avec le V.N. sur de nouvelles bases.
Après son poste d’Ambassadeur à Paris, M .Khiêm vécut dans des conditions bien modestes et retourna finalement à sa profession première en acceptant un poste de Professeur dans un Lycée privé après avoir refusé toutes les offres de son vieil ami devenu alors Chef de l’Etat Français, le Président G.Pompidou. Il n’avait pas non plus accepté le poste d’Ambassadeur du V.N. auprès de son autre ex-condisciple, le Président du Sénégal Léopold Sedar Senghor, poste offert par le Président Nguyễn văn Thiệu.
Par la suite on savait que l’Ambassadeur Phạm duy Khiêm avait lui-même mis fin à sa vie en 1974 à l’âge de 67 ans. En apprenant sa mort tragique, j’avais réuni quelques uns de ses anciens proches collaborateurs vivant à Saigon ainsi que son frère le compositeur Phạm Duy dans une Pagode à Phú Nhuận, une banlieue de Saigon pour prier pour le repos d’un homme de grande valeur, délaissant tous les honneurs matériels pour rester fidèle à ses convictions, ses principes, bref, à lui-même.
Revenant à la Foire de Paris cette année j’ai encore en mémoire d’autres figures de l’époque. Outre l’Ambassadeur Phạm duy Khiêm je dois parler de deux artistes qui ont contribué au succès du Pavillon du Viet-nam.
En effet, en 1956, alors que les relations entre la France et le Viet-nam entrent dans une nouvelle phase phase sous un ciel embelli, notre Gouvernement sur ma proposition, avait accepté de faire de la Foire de Paris un moyen de propagande pour mieux faire connaître au monde entier le visage du nouveau Viet-nam, à peine sorti de l’orbite du colonialisme .
Je voulais, au lieu d’un petit stand traditionnel d’une vingtaine de mètres carrés où sont exposés quelques objets en laque, des broderies , des photos, bref, un étalage pauvre et modeste, construire un grand pavillon avec de nombreux produits en provenance du pays. Pour cela, je demandai à un ami, l’architecte Ngô viết Thụ, 1er Prix de Rome de s’occuper de ce projet. Mais malheureusement Thụ devait rentrer au Viet-Nam, appelé par les autorités de Saigon à d’autres projets plus importants. On sut par la suite que c’était Thụ qui avait conçu le plan des Hameaux stratégiques pour faire face à l’infiltration des guerilleros communistes.
Après le refus de Thụ, je dus m’adresser à un autre architecte, moins brillant que Thụ mais aussi Lauréat du Prix d’Architecture de Londres, l’architecte Võ toàn Công. Ce dernier a donc fait construire un grand Pavillon d’une centaine de mètres carrés avec sur la façade un bas-relief représentant des paysans viet namiens travaillant dans les rizières. Cette sculpture a été réalisée par Nguyễn văn Thế , Premier Prix de Sculpture de Rome, le même sculpteur qui, quelques années plus tard, construira le monument de Hai Bà Trưng au Quai Bạch Đằng à Saigon.
Le Pavillon du Viet-nam reçut cette année-là des dizaines de milliers de visiteurs, de longues files d’attente se trouvant à l’entrée du Pavillon prouvaient le succès éclatant du Pavillon.
A l’intérieur, de nombreux objets de valeur étaient exposés notamment des tableaux géants de laque exécutés par les deux maitres-laqueurs de l’époque, les artistes Thành Lễ et Trần Hà.On y voyait également pour la première fois , l’exposition des fruits exotiques comme le durian, les avocats …envoyés de Saigon par avion. De nombreuses commandes de tableaux de laque, de broderie de dentelle ont été adressées par la suite aux producteurs.
Le maitre-d’œuvre du Pavillon, l’architecte Võ toàn Công a été ensuite, par l’intermédiaire de mon homologue du Maroc et de moi-même, engagé par le Gouvernement Marocain pour un projet d’édification d’un Mausolée pour le Roi Mohammed V, père de Hassan II, le Souverain régnant. M. Võ Toàn fit par la suite une brillante carrière au Maroc comme Architecte du Roi alors que Ngô viết Thụ, curieux destin, vécut de longs mois dans un camp de rééducation après la chute de Saigon.
Après quelques heures de visite dans les divers stands, mon épouse revient me chercher et me fait sortir de mes pensées , mettant fin à mon retour dans le passé, un passé lointain mais dont certaines images sont toujours gravées dans ma mémoire.
Paris 07 mai 2015
Trương hữu Lương
Le président Coty reçu par le responsable du stand M. Truong Huu Luong
Cher Lương,
Đã 2 lần, moa vào website toa cho và đọc article của toa nói về Hội Chợ Paris và GS Phạm Duy Khiêm. Đã 2 lần, moa viết commentaire nhưng cứ bị xóa, chả hiểu web này làm ăn ra sao.
Article của toa viết tốt lắm vì toa có trách nhiệm trưng bày gian hàng VN và xây dựng nó to lớn gấp bội phần. KTS Ngô Viết Thụ (giải Khôi nguyên La Mã) là người vẽ kiểu Dinh Độc Lập đó.
Về ông PD Khiêm thì moa cũng được biết khá rõ. Trước năm 1945, thật ra, ông với em là Phạm Duy đã là hàng xóm của moa. Nhà ông số 54 và nhà moa số 52 sát vách nhau ở Rue Albert Pouyanne (nay là Phố Lò Sũ và cái block đó trước kia có lẽ có tên là Phố Hàng Dầu). Trong Hồi Ký 1, Phạm Duy có nói tới gia đình moa và có nói rỡn:
Nhà tôi ở phố Hàng Dầu,
Số nhà 54 đứng đầu du côn.
Phạm Duy hơn moa 9 tuổi nên mỗi khi sang nhà moa chơi đều ngoác mồm ra dọa ngáo ộp thằng bé. Năm 1939, ông Khiêm — thiên hạ gọi đùa là Trạng mẹo — có sang chào ông cụ moa để đi Pháp đánh giặc Đức. Hồi đó chính quyền có khoa trương khẩu hiệu; « Rồng Nam Phun Bạc. Đánh bại Đức tặc ». Chả biết có đánh đấm gì không mà chỉ ít lâu sau lại thấy ông lò dò về nhà. Đọc Hồi Ký Phạm Duy mới thấy ông rất mực nghiêm khắc và độc đoán, đặc biệt đối với cậu em Phạm Duy, bắt PD đi học trường Kỹ Nghệ Thực Hành. Sau đó PD bỏ học rồi đi theo gánh hát và sau lập nên sự nghiệp lừng lẫy nhờ thiên tài sáng tác nhạc.ai cũng nể phục.
Ông Khiêm sau đó làm giáo sư Albert Sarraut. Hồi bọn mình di tản vào Hà Đông học chung với các trường Tây, thỉnh thoảng thấy ông chuyện trò với học sinh các trường Pháp (AS, Felix Faure) trong những giờ giải lao ngoài trời. Moa có nhập bọn nghe chơi, có lần thấy ông nói sai cái gì đó làm học trò cười ầm lên. Nghe nói ông rất khắt khe trong việc chấm bài cho điểm, có khi chỉ thí cho 1 quart de point (?),không biết có thật không. Toa nói ông ấy semi-fou kể ra cũng có lý. Nhìn lại cuộc đời ông Khiêm thì thấy ông rất cô đơn, chả biết có bạn gái gì không? Hồi ông làm Đại sứ thời Đệ I Công Hòa, toa thấy con người ông ra sao? Năm 1967, ông có về Saigòn và đến thăm Phủ Thủ Tướng (hồi đó gọi là UB Hành Pháp Trung Ương). Vỏ phòng bọn moa có thuyết trình cho ông về tình hình quân sự lúc đó.
Để biết thêm về ông, dĩ nhiên moa có đọc cuốn « Légendes des Terres Sereines » của ông thấy văn phong nhẹ nhàng, đơn giản chứ không màu mè bóng bẩy như văn cụ Nguyễn Mạnh Tường trong cuốn « Un Excommunié » mà moa mua ở Paris năm 2003.
Sau đó thấy tin ông tự vẫn năm 1974 bằng cách dìm mình dưới ao gần nhà. Không biết vì lý do gì. Túng quẫn? Tuyệt vọng? Thật cũng tiếc cho một con người tài hoa đã thành đạt như ông.
Theo moa nghĩ thì thấy có lẽ ông tự cho rằng đời mình đã đến một ngõ cụt vì sở học của ông không giúp ông có được một cuộc sống cao sang tốt đẹp. Và cũng vì tự ái cao, ông không thể hạ mình làm những công việc xoàng xĩnh để kiếm sống sau khi đã giữ một chức vị cao quý như Đại Sứ.
Thăm toa và bà xã. Hy vọng sẽ sang Paris chơi mùa thu này và gặp gỡ các bạn. Bọn moa vừa làm một chuyến du lịch Nhật và Đại Hàn 12 ngày. Cũng thích nhưng mệt mỏi vì tuổi già mà phải cuốc bộ hơi nhiều.
Viên
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Nguyen Tu Hung, Webmaster
Remerciements sincères
Bùi Xuân Toàn
Les copains de Truong Huu Luong connaissent tous son excellente mémoire. Il a su aussi partager avec moi ses années d’Attaché commercial et financier à l’Ambassade du ViêtNam : nous avons fait de beaux voyages en Europe dans sa voiture AUSTIN-Hillman immatriculée CD en ces temps où étudiant j’avais juste de quoi payer le loyer et les 6O tickets de restaurant-universtaire. Ces années là ont-elles aussi été les meilleures de Pham Duy Khiêm sachant qu’il n’est heureux que quand il se sent utile, il travaille au redressement de l’image du VN , à la réconciliation Franco-Vietnamienne, au départ sans drames des anciennes forces coloniales…
Cependant Khiêm est un être ultrasensible pour ne pas dire écorché vif, relisons ce qu’il a écrit :
– « …l’image de ma grand-mère pendant les deux ans où elle survécut à mon père mort ruiné. Quand je la décris confectionnant le bétel à l’intention des visiteurs, puis s’écriant soudain « voilà du bien bon bétel, et personne ne vient ! » je ne puis retenir mes larmes.. »
– « …Pauvre grand-mère ! Ma mère, ta bru, a conservé la vieille boîte ronde, mais elle ne sait pas tout ce que celle-ci représente pour moi . Puisse-t-elle n’avoir jamais, pour sa part, à la refermer avec le même cri et la même douleur que toi ! Je promets d’y veiller, et c’est un des prétextes que j’aurais pour continuer, dans un monde sans intérêt, cette existence sans raison. Mais jusqu’à mon dernier soupir, je n‘oublierai jamais – oh ! non, nul humain bonheur ne pourra me faire oublier – le temps où tu éclatas en sanglot, seule avec ta boîte de bétel. » (Nam & Sylvie, Légendes des terres sereines )
Rêveur et poète Khiêm aime son pays natal, les villages, districts et villes dont les noms sont souvent composés d’idéogrammes « Thái – Hoà – An – Bình » il les nomment « Terres Sereines » …dans l’espérance ancestrale du « yên binh ».
La France, Paris, il les aime charnellement :
– « …Nous nous retrouvons dans la délicieuse avenue de l’Observatoire : quel calme, quelle distinction ! Ni voitures, ni passants ; seulement un ou deux couples. Le soir descend, avec ses longues bandes d’ombre des arbres, et elles nous couvrent. Un moment nous recevons quelques gouttes de pluie. Ah ! douceur de sa joue, ardeur de ses lèvres ; ce corps qui se moule dans mes bras ! « (Nam & Sylvie)
Seul engagé indochinois en Septembre 1939, en pleine tempête, « kẻ sĩ » il explique à Trần Trọng Kim :
« ;;;Je sais que du fond du cœur, vous ne pouvez pas aimer les Français. Je comprends aussi que certains compatriotes m’objectent :
« Même si l’on nous avait prodigué des bienfaits sans nombre, est-ce qu’on pourrait les mettre en balance avec notre vie ? «
Ma réponse est simple :
« Nous pouvons avoir à nous plaindre, et cependant combattre pour la France quand elle est en danger. » Quel Annamite ne comprendrait ce langage ? Lequel d’entre nous aurait oublié nos traditions chevaleresques et la vieille notion du « quân-tu», la noblesse de l’homme bien né ?
et plus tard en Février 1940, toujours à TrânTrong Kim :
« Seules la pensée du pays et celle de ma mère traversent quelquefois mon chemin. Il est difficile de concilier tous les appels, et j’espère qu’il sera pardonné au mauvais fils qui tâche de devenir un homme. » (La place d’un homme)
En 1968, de retour du VN il m’a raconté ce qu’il a vu à Hué après le massacre du Têt Mâu Thân, et surtout l’odeur des fosses communes, c’est la seule fois où je l’ai vu bouleversé me lisant sa déclaration à l’AFP faite quelques jours auparavant .
1974. Je suis arrivé en retard à son enterrement à cause d’obligations professionnelles. Rentré au Blanc-Mesnil plein de remords j’ai retrouvé dans Nam & Sylvie la lettre qu’il écrivit à Sylvie des années 1930 avec cette interrogation :
« …Et puis la vie vaut-elle bien qu’on se lève si tôt pour elle ? Sylvie. »
et la merveilleuse réponse de Sylvie :
« Et puis la vie vaut-elle bien qu’on se lève si tôt pour elle ? » Ah ! Nam, je ne sais pas ! La petite fiancée de Frantz ouvrirait tout grands ses yeux sans rêve et vous répondrait : « Ne dois je pas balayer le pas de ma porte dès le clair matin ? »
Il n’y a que ces êtres-là Nam, pour répondre « oui » ou « non »d’une voix sonore et assurée, sans inquiétude et sans remords.
Je veux encore croire, moi, à ce qu’ils jugent folie.
Et le dernier paragraphe du roman :
-« Car rien n’est jamais tout à fait fini, dans le monde du cœur. Ou plutôt rien ne devrait l’être, comme le dit en huit mots en adage difficile à traduire brièvement. « Une fois que vous avez passé la rivière ensemble, la connaissance est faite ; une fois que vous avez compté un jour ensemble, c’est une dette et une fidélité. »
Cher LUONG, des « Sources Jaunes » Khiêm nous murmure encore :
Một chuyến đò nên quen, một ngày nên nghĩa.
Bùi Xuân Toàn
Les copains de Truong Huu Luong connaissent tous son excellente mémoire. Il a su aussi partager avec moi ses années d’Attaché commercial et financier à l’Ambassade du ViêtNam : nous avons fait de beaux voyages en Europe dans sa voiture AUSTIN-Hillman immatriculée CD en ces temps où étudiant j’avais juste de quoi payer le loyer et les 6O tickets de restaurant-universtaire. Ces années là ont-elles aussi été les meilleures de Pham Duy Khiêm sachant qu’il n’est heureux que quand il se sent utile, il travaille au redressement de l’image du VN , à la réconciliation Franco-Vietnamienne, au départ sans drames des anciennes forces coloniales…
Cependant Khiêm est un être ultrasensible pour ne pas dire écorché vif, relisons ce qu’il a écrit :
– « …l’image de ma grand-mère pendant les deux ans où elle survécut à mon père mort ruiné. Quand je la décris confectionnant le bétel à l’intention des visiteurs, puis s’écriant soudain « voilà du bien bon bétel, et personne ne vient ! » je ne puis retenir mes larmes.. »
– « …Pauvre grand-mère ! Ma mère, ta bru, a conservé la vieille boîte ronde, mais elle ne sait pas tout ce que celle-ci représente pour moi . Puisse-t-elle n’avoir jamais, pour sa part, à la refermer avec le même cri et la même douleur que toi ! Je promets d’y veiller, et c’est un des prétextes que j’aurais pour continuer, dans un monde sans intérêt, cette existence sans raison. Mais jusqu’à mon dernier soupir, je n‘oublierai jamais – oh ! non, nul humain bonheur ne pourra me faire oublier – le temps où tu éclatas en sanglot, seule avec ta boîte de bétel. » (Nam & Sylvie, Légendes des terres sereines )
Rêveur et poète Khiêm aime son pays natal, les villages, districts et villes dont les noms sont souvent composés d’idéogrammes « Thái – Hoà – An – Bình » il les nomment « Terres Sereines » …dans l’espérance ancestrale du « yên binh ».
La France, Paris, il les aime charnellement :
– « …Nous nous retrouvons dans la délicieuse avenue de l’Observatoire : quel calme, quelle distinction ! Ni voitures, ni passants ; seulement un ou deux couples. Le soir descend, avec ses longues bandes d’ombre des arbres, et elles nous couvrent. Un moment nous recevons quelques gouttes de pluie. Ah ! douceur de sa joue, ardeur de ses lèvres ; ce corps qui se moule dans mes bras ! « (Nam & Sylvie)
Seul engagé indochinois en Septembre 1939, en pleine tempête, « kẻ sĩ » il explique à Trần Trọng Kim :
« ;;;Je sais que du fond du cœur, vous ne pouvez pas aimer les Français. Je comprends aussi que certains compatriotes m’objectent :
« Même si l’on nous avait prodigué des bienfaits sans nombre, est-ce qu’on pourrait les mettre en balance avec notre vie ? «
Ma réponse est simple :
« Nous pouvons avoir à nous plaindre, et cependant combattre pour la France quand elle est en danger. » Quel Annamite ne comprendrait ce langage ? Lequel d’entre nous aurait oublié nos traditions chevaleresques et la vieille notion du « quân-tu», la noblesse de l’homme bien né ?
et plus tard en Février 1940, toujours à TrânTrong Kim :
« Seules la pensée du pays et celle de ma mère traversent quelquefois mon chemin. Il est difficile de concilier tous les appels, et j’espère qu’il sera pardonné au mauvais fils qui tâche de devenir un homme. » (La place d’un homme)
En 1968, de retour du VN il m’a raconté ce qu’il a vu à Hué après le massacre du Têt Mâu Thân, et surtout l’odeur des fosses communes, c’est la seule fois où je l’ai vu bouleversé me lisant sa déclaration à l’AFP faite quelques jours auparavant .
1974. Je suis arrivé en retard à son enterrement à cause d’obligations professionnelles. Rentré au Blanc-Mesnil plein de remords j’ai retrouvé dans Nam & Sylvie la lettre qu’il écrivit à Sylvie des années 1930 avec cette interrogation :
« …Et puis la vie vaut-elle bien qu’on se lève si tôt pour elle ? Sylvie. »
et la merveilleuse réponse de Sylvie :
« Et puis la vie vaut-elle bien qu’on se lève si tôt pour elle ? » Ah ! Nam, je ne sais pas ! La petite fiancée de Frantz ouvrirait tout grands ses yeux sans rêve et vous répondrait : « Ne dois je pas balayer le pas de ma porte dès le clair matin ? »
Il n’y a que ces êtres-là Nam, pour répondre « oui » ou « non »d’une voix sonore et assurée, sans inquiétude et sans remords.
Je veux encore croire, moi, à ce qu’ils jugent folie.
Et le dernier paragraphe du roman :
-« Car rien n’est jamais tout à fait fini, dans le monde du cœur. Ou plutôt rien ne devrait l’être, comme le dit en huit mots en adage difficile à traduire brièvement. « Une fois que vous avez passé la rivière ensemble, la connaissance est faite ; une fois que vous avez compté un jour ensemble, c’est une dette et une fidélité. »
Cher LUONG, des « Sources Jaunes » Khiêm nous murmure encore :
Một chuyến đò nên quen, một ngày nên nghĩa.
Bùi Xuân Toàn