C’est un grand plaisir pour moi de publier ce texte de mon ami Truong Huu Luong. Il y a plusieurs raisons à cela. Je garde un souvenir inoubliable de notre ancien lycée Albert Sarraut de Hanoi où j’ai passé de merveilleuses années de 1950 à 1952, à la découverte de la culture française et à nouer des amitiés dont certaines durent encore à ce jour. En France, durant mes dernières années d’étude, j’ai séjourné pendant 4 ans à la Maison d’Indochine, (devenue la Maison de l’Asie du Sud-Est), ce qui me permet de connaitre la plupart des autres Maisons de la Cité U, comme celle des Provinces de France, de la Maison Internationale, du Cambodge, le restaurant de la FOM (France d’Outre-Mer ), desservant des meilleurs plats que ceux de la Maison Internationale, de la Maison Deutsch Meurthe où j’ai habité les premiers jours après avoir posé les pieds sur le sol de France. Hélas ce temps d’étudiant datant d’une soixantaine d’années est révolu, enseveli au fond de moi. Mais maintenant chaque fois que je roule sur le Bld Jourdan, que je prenne le métro De la Cité U, ces souvenirs inoubliables me remontent à la mémoire et me réveille la nostalgie du temps de ma jeunesse. Nguyen Tu Hung.
TRƯƠNG HỮU LƯƠNG
A l’initiative d’une jeune amie, Trần Lệ Khanh, mon épouse et moi-même, nous nous sommes rendus à la Cité Universitaire de Paris pour y rencontrer sa sœur aînée, Lê Bảo Xuyến, venant des Etats-Unis et qui devait quitter Paris le lendemain-même.
Je n’ai jamais rencontré Bảo Xuyến jusqu’au jour de l’enterrement d’un ami commun, l’architecte Khúc Duy, décédé le mois dernier. Bảo Xuyến est de ma génération des années 1944-45 au lycée Albert Sarraut de Hà Đông ( toutes les écoles de Hanoi étaient évacuées en province à cause des bombardements américains sur la capitale ). Et c’est ainsi que nous avons pu évoquer ensemble d’innombrables souvenirs communs, d’abord relatifs à nos anciens professeurs dont Melle Monique Vinay, notre professeur principal qui nous enseignait à l’époque le latin ou à Mme Raspail, la proviseure du lycée et ensuite à d’autres faits marquants qui restent encore dans notre mémoire.
Mais avant tout, je voudrais parler de l’endroit où nous nous sommes rencontrés, à savoir la Maison Internationale de la Cité Universitaire.
En effet ce bâtiment situé sur le Bd Jourdan dans le 14ème arrondissement de Paris est pour beaucoup d’anciens étudiants parisiens un lieu de mémoire.
Bảo Xuyến comme moi-même, nous ne nous y sommes pas retournés après plus d’un demi-siècle.
A l’époque, au début des années 50 où j’étais jeune étudiant, j’habitais à 500 m de la Cité alors que Bảo Xuyến à un moment donné y avait habité pendant quelque temps.
Très souvent je me rendais à la Cité avec mon petit vélo pour divers motifs : soit pour voir des amis qui habitaient la plupart à la Maison d’Indochine comme Đinh Trịnh Hiển, Trương Như Bích, ou les provinces de France tels que l’architecte Ngô Viết Thụ ( 1er prix de Rome ), Phạm Trọng Khiêm…soit pour le sport : piscine, tennis… soit pour des soirées dansantes organisées presque chaque week-end, mais surtout pour des repas d’étudiants à la Maison Internationale où justement je vais y remettre les pieds pour avoir l’occasion de revoir ce lieu qui m’était si cher.
Le cadre de la Maison Internationale est toujours le même ainsi que le restaurant lui-même : toujours une queue interminable pour prendre soi-même un plateau et se servir des plats limités pour chaque personne. Tarif spécial pour les étudiants et tarif différent pour les visiteurs.
Le souvenir le plus frappant qui me vient à l’esprit est l’image de notre ancien professeur du lycée Albert Sarraut , l’écrivain Phạm Duy Khiêm ( condisciple des Présidents Pompidou et Léopold Sedar Senghor du Sénégal ) qui plus tard deviendra le premier ambassadeur de la République du Viet-Nam en France.
Je revois encore avec émotion l’image d’un intellectuel qui après son déjeuner commun avec nombre de ses anciens élèves, se livrait à des heures entières de lecture et de méditation à la bibliothèque avant d’aller se plonger dans les eaux fraîches de la piscine.
J’ai parlé de mon ancien Maître dans divers autres articles car par la suite, j’ai eu l’honneur d’être son collaborateur en qualité d’Attaché Economique à l’Ambassade du Viet-Nam en France. On sait par la suite que le pauvre Phạm Duy Khiêm a eu une mort tragique en France en 1974 à l’âge de 66 ans.
Donc avec les sœurs Bảo Xuyến et Lệ Khanh nous avons passé une après-midi très agréable.
Au cours du déjeuner, on a évoqué les souvenirs de jeunesse avec des amis dont la plupart ne sont plus de ce monde comme le docteur Phạm Quang Thiều, les frères Bạch Thái Bình, Bạch Thái Định, Dương Liên ( ancien PDG de la Cie Việt Nam Hàng Hải ) et particulièrement l’adorable époux de Bảo Xuyến , le professeur Lê Văn que j’avais connu en 1950 à bord du bateau Athos II qui nous a transportés à Marseille, après un long mois de trajet .
Après ses études à Paris, Lê Văn était rentré à Huế pour assumer les fonctions de Doyen de la faculté des Lettres sous la direction du Recteur de l’Académie, le Révérend Père Cao Văn Luận.
Après des heures de conversation à bâtons rompus nous nous quittâmes en nous donnant rendez-vous pour la prochaine fois, toujours à Paris, car Mme Lê Bảo Xuyến doit s’y rendre chaque année pour visiter plusieurs membres de sa famille vivant en Europe ainsi que d’anciens amis et condisciples.
Notons en passant que Bảo Xuyến est très acive au sein de l’Association des Anciens d’ Albert Sarraut en Californie dont elle est la Vice-Présidente.
En nous disant au revoir, Bảo Xuyến ajouta ces quelques mots ô combien sympathiques :
« Je me souviendrai à jamais de cette rencontre historique ».
Paris le 14 juillet 2019